Aller au contenu

Page:Massenet - Mes souvenirs, 1912.djvu/286

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
278
MES SOUVENIRS

qu’elle sait, quand il le faut, faire abstraction d’elle-même, sacrifier le charme de ses grâces et l’éclat de ses attraits aux exigences supérieures de l’art !

Il en fut de même, mes chers enfants, trente-cinq années plus tard, à l’Opéra, ainsi que la remarque pourra en être justement faite.

Je me souviens encore de ces hautes fenêtres, de ces baies immenses qui envoyaient le jour dans ma grande chambre d’Égreville.

J’avais lu, après dîner la très attachante brochure de la Rome vaincue jusqu’aux extrêmes lueurs de la journée. Je ne pouvais m’en détacher, tant elle m’enthousiasmait. Il fallut, comme l’a dit notre grand Corneille, que

… l’obscure clarté qui tombe des étoiles,
Bientôt, avec la nuit…

arrêtât ma lecture.

Dois-je ajouter, après cela, que je ne pus résister à me mettre aussitôt au travail, et que j’écrivis, les jours suivants, toute la scène de Posthumia, au 4e acte ? Vous me direz, sans doute, que je travaillais ainsi bien au hasard, n’ayant pas encore distribué les scènes suivant les exigences d’un ouvrage lyrique. J’avais cependant décidé déjà mon titre : Roma.

Le véritable emballement dans lequel ce travail me jeta, ne m’empêcha pas, néanmoins, de songer qu’à défaut d’Alexandre Parodi, mort en 1901, l’autorisation de ses héritiers m’était nécessaire. J’écrivis donc ; mais ma lettre devait rester sans réponse.

Je dus ce contre-temps à une adresse erronée. La veuve de l’illustre tragique m’apprit, en effet, par la