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Page:Massenet - Mes souvenirs, 1912.djvu/307

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MASSENET PAR SES ÉLÈVES
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données avec la vivacité d’intelligence et la passion qu’y apportait M. Massenet, ces leçons avaient un pouvoir merveilleux d’éveiller et de soutenir l’activité d’un jeune esprit. Jouant et chantant lui-même, illuminant ainsi nos pauvres essais, le maître démêlait mieux que nous ce que nous avions rêvé d’y mettre, discernait du premier coup la miette féconde dont nous j n’avions pas su tirer parti ; et s’il nous renvoyait, notre travail en morceaux, il ne nous renvoyait qu’avec l’ardente confiance de faire mieux, et le moyen topique d’y réussir. La clarté, la mesure, la rigoureuse propreté, mais le mouvement juste de la forme ; la sincérité et la simplicité du sentiment : là étaient ses premiers conseils.

On lui a reproché cet enseignement : on a dit que tous ses élèves « faisaient du Massenet ». En sept années, je ne l’ai pas entendu demander une fois, ou seulement approuver qu’on en fît. Et ses élèves ont-ils été seuls à en faire ? Des maîtres mêmes, contemporains de M. Massenet, et jusqu’à ses aînés, de combien peut-on dire qu’ils n’ont pas un instant subi l’empreinte de son irrésistible séduction ? Ce sont les natures amorphes, comme Guiraud et Delibes, qui peuvent former des élèves qui ne gardent rien d’elles.

Quant aux auteurs qu’il nous faisait connaître, M. Massenet les choisissait avec un éclectisme parfait, et quelquefois le plus loin qu’il pouvait sembler de son propre idéal. Il trouvait dans chacun l’exemple efficace, soit pour appuyer quelque précepte technique, soit, et plus souvent encore» pour nous faire saisir de quelles impressions de l’art, de la nature, et