petite flûte aimable qui régnait alors en souveraine à la salle Favart, il ne craignit pas d’y emboucher la trompette épique dès son premier ouvrage, cette Euphrosine qui fut une révélation et provoqua dans tout Paris un véritable enthousiasme.
Un maître artiste était né à la France.
D’autres, et parmi eux mon éminent ami Arthur Pougin, vous ont dit dans leurs études sur Méhul, bien mieux que je ne saurais le faire, toute la glorieuse série des ouvrages qui suivirent Euphrosine, et ont fait ressortir les mérites de Stratonice, d’Ariodant, d’Adrien, de l’Irato, du Jeune Henry et surtout de cet incomparable Joseph, qui passe immuable à travers les âges dans son éternelle beauté.
J’aime à me reporter à ces temps héroïques de la musique où l’opéra moderne, secouant les formes pédagogiques qui l’enserraient, sortait si superbementde ses langes, servi par cette grande pléiade d’artistes qu’on appelait Chérubini, Lesueur, Spontini, Grétry, Berton ; et je dis moderne avec intention, car ce sont eux qui ont ouvert les voies que nous suivons encore. Sans doute la palette orchestrale a pu s’enrichir avec l’armée des instruments qui s’augmentait ; on apporte peut-être à la musique de nos jours plus de raffinements, plus de recherches, plus de coloris et de pittoresque, mais on ne saurait y mettre plus de noblesse, plus de foi, plus d’ampleur que ces rudes pionniers d’un art qu’ils ont créé.
Méhul était à leur tête et conduisait le mouvement. Il eut tous les honneurs, tous les succès. Il fut le premier musicien nommé à l’Institut de France, il fut aussi le premier dans la Légion d’honneur.