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s’il ne demanderont point à composer, et s’ils ne vous accorderont point de nous séparer les uns des autres sans acte d’hostilité, connue il est souvent arrivé en de semblables rencontres ? Mais à présent que vous les avez aigris, ils vont se ruer sur nous d’une telle rage que sans doute nous sommes perdus. Ce capitaine ne raisonna pas mal car les Iroquois voyant leurs gens tués lorsqu’ils s’y attendaient le moins, furent transportés d’un si grand désir de se venger, que sans se soucier des coups de fusils qu’on tirait incessamment, se jetèrent à corps perdu à la palissade, et s’y attachèrent au-dessous des canonnières où on ne leur pouvait plus nuire, parce qu’il n’y avait point d’avance d’où l’on pût les battre. Par ce moyen nos Français ne pouvaient plus empêcher ceux qui coupaient les pieux. Ils démontent deux canons de pistolets qu’ils remplissent jusqu’au goulet, et les jettent sur ces mineurs après y avoir mis le feu. Mais le fracas ne les ayant point fait écarter, ils s’avisèrent de jeter sur eux un baril de poudre avec une mèche allumé. Mais malheur le baril n’ayant pas été poussé assez rudement, par-dessus la palissade au lieu de tomber du côté des ennemis tomba dans le fort où prenant feu, il brûla aux uns le visage, aux autres les mains, et à tous il ôta la vue un assez long temps, et les mit hors d’état de combattre. Les Iroquois qui étaient à la sape s’aperçurent de l’avantage que cet accident leur donnait. Ils s’en prévalurent et se saisirent de toutes les meurtrières que ces pauvres aveugles venaient de quitter. On vit bientôt tomber de côté et d’autre, tantôt un Huron, tantôt un Algonquin, tantôt un Français, en sorte qu’en peu de temps une partie des assiégés se trouvèrent morts et le reste blessés. Un Français, craignant que ceux qui étaient blessés à mort n’eussent encore assez de vie pour expérimenter la cruauté du feu des Iroquois, acheva d’en tuer la plus grande partie à coups de hache par un zèle de charité qu’il estimait bien réglé. Mais enfin les Iroquois, grimpant de tous côtés, entrèrent dans la palissade et prirent