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À BORD DU NORTHUMBBRLAND

turbateur du repos du monde, il s’était livré à la vindicte publique ». Sans doute se proposaient-elles, d’après ces derniers mots, de mettre sa tête à prix ; elles ne l’osèrent point — au moins officiellement. À partir de ce moment, l’Empereur ne fut plus pour elles que Napoléon Buonaparte, — l’U étant pris pour une injure et une aggravation de peine. Les souverains légitimes régnant en Europe prononcèrent donc sa déchéance « au nom de la Sainte-Trinité » et en vertu des droits qu’un souverain légitime a sur son peuple ; sous les mêmes autorités, ils avaient transformé en prisonnier l’hôte qui était venu s’abriter sous le pavillon britannique. Désormais, il serait interné dans une enceinte fortifiée, gardé à vue, traité comme un officier général presque régulièrement investi de son grade, et l’on comptait même qu’étant donné son point de départ, c’était là une faveur grande.

Si cuisantes que fussent les blessures faites ainsi à sa dignité, Napoléon pouvait, à bord du Northumberland, se considérer comme un voyageur obligé de subir, dans une auberge flottante, les manques d’égards de son hôte ; d’ailleurs, si l’amiral avait marqué nettement qu’il entendait rester le maître à son bord, il avait des déférences ; il venait dans le salon, à cinq heures, dire à l’Empereur qu’on était servi ; il ne parlait et ne faisait parler que français, et, si les deux services prolongeaient le dîner pendant une heure ou une heure et demie, c’était une politesse qu’il