Page:Matter - Saint-Martin, le Philosophe inconnu, 1862.djvu/35

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tefois n’ose pas, dans la savante Alexandrie, prêter autant de discours apocryphes à ses personnages sacrés que leur en prête dom Martinez à Bordeaux, trop audacieux dans la patrie de Montesquieu. Ce fut sans doute cette audace, jointe à la hauteur des problèmes, qui fascina des adeptes tels que l’abbé Fournie et Saint-Martin, déjà séduits à moitié, l’un par les aspirations passionnées d’une âme tendre et pieuse, l’autre par les misères et les souffrances d’un esprit que tourmentait le scepticisme des sages ou la négation des incrédules du temps.

On le sait par le témoignage de tous les siècles, partout où le sensualisme amène à sa suite ses deux grossiers compagnons, l’athéisme et le matérialisme, le rationalisme et le spiritualisme, ses adversaires légitimes, se jettent alarmés dans les bras du mysticisme et de la théosophie, qui les entraînent rapidement, dans ces mauvais jours, vers des régions qu’en des jours plus heureux ils n’aborderaient qu’en tremblant.

Sur la fin du dernier siècle ces contrastes se produisirent avec éclat en France comme dans le reste de l’Europe ; on aimait alors bien des associations mystérieuses qui depuis ont été appréciées sévèrement.

Dans la société secrète où Saint-Martin fut introduit tout à coup à Bordeaux, il y avait alors, comme ailleurs, autre chose qu’un simple enseignement antisensualiste ou spiritualiste. Martinez offrait un ensemble de symboles et de leçons qui se complétaient par des pratiques ou des opérations théurgiques correspondantes. À cette vaste théorie d’une chute arrivée dans les cieux comme sur la terre, à cet enseignement d’un tribut