Page:Matthieu - Aman, 1589.djvu/10

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La fureur, le deſpit, les effrois, le courroux,
De noſtre Dieu, helas ſe lancent contre nous,
Nos cueurs, nos laſches cueurs obstinement Athees,
Sur l’enclume d’erreur, dans les riues Lethees
Du torrent infernal à froid furent battus,
D’vn roc Sicilien nous les auons veſtus,
Et contre tout l’honneur de l’Iſacide race,
Nous auons Apostats quité la ſaincte trace
De nos bons biſayeulx, & d’un cueur inſenſé.
Nous auons aux faux Dieux barbares encenſé
Ah malheureux, dit Dieu, troupe aux vertus rebelle,
Vomiſſez trébuchez d’vne cheute mortelle
A l’aſpect forcené de mes dards puniſſeurs,
Que i’enuoye irrité dans voz flancs rauiſſeurs,
Qui a veu quelquefois du ciel la ſuperfice,
Meu d’vn iuste desdain pour chastier le vice
De ces Baccants gloutons qui noyent dans le vin
De leur diuin eſprit le preſent plus diuin
Se voiler d’vn carquois plein de fleches malignes
Qui doiuent ſans merci deshonorer noz vignes,
Verſant cent mile fois cent groſſes de balons
Sur nos vineux coutaux, ſur nos vineux valons
Tellement que de greſle & de froideur couuerte,
De verdure & de fleurs la campagne eſt deſerte
Tout l’honneur de Denis eſt en friche reduit,
Et ce mal tous les fruits à meſme ſort conduit.
Celuy la, di-ie, peut imaginer l’orage
Qui doit combler ton chef au printemps de ton age
Celuy la peut iuger de combien de cousteaux
De combien de fiers dards, & de combien de fleaux
Ton corps ſera playé & ta verte ieuneſſe
Tu ſeras deſpouillé du manteau de nobleſſe
Quant & toy deſcendra ta gloire en meſme iour