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De l’antique Thabor a resplendi la cime ;
La Méditerranée étend au loin ses eaux ;
De tous les feux du ciel s’illuminent ses flots.
Mais quels lointains concerts ! ô surprise ! ô merveille !
Quels suaves accords ont frappé mon oreille !
D’un chœur de bienheureux ce sont les pures voix ;
Dans la nue, à mes yeux, apparaît une croix
Que la Religion, désolée, abattue,
Comme une vierge en deuil, d’un long voile vêtue,
En fuyant l’occident, ce séjour des douleurs,
Embrasse tendrement en la baignant de pleurs.
Des Chérubins ailés emportent les calices
Où nos prêtres buvaient le sang des sacrifices,
Quand l’Europe chrétienne immolait sur l’autel
La victime sans tache, en un jour solennel ;
Ils tiennent dans leurs mains des images sacrées,
De velours et de soie élégamment parées ;
J’y vois tous ces martyrs qui jadis, ici-bas,
Soutinrent sans pâlir tant de rudes combats
Pour mériter du Christ l’immortelle couronne,
Plus loin, le Saint des Saints dans l’ostensoir rayonne.

J’abaisse vers la terre un timide regard,
Et le crime honteux s’enfuit de toute part.
Des prêtres revêtus de chasubles dorées,
Parcourent du levant les désertes contrées ;
Une blanche auréole, en descendant des cieux,
Vient entourer leur front d’un cercle radieux,
Et soudain l’on entend une voix inconnue,
Laissant tomber ces mots qui traversent la nue :
« Allez, prêtres du Christ ; allez, marchez en paix ;
» De la religion répandez les bienfaits. »
Une étoile allumée à la céleste voûte,
Des lévites sacrés éclaire au loin la route ;
Ils s’avancent, la foi ranime les déserts ;
Bientôt, de ces climats les habitants divers
Abjurent leurs erreurs au pied de la Croix sainte ;
De l’antique Sion ils inondent l’enceinte ;
Et, pressant le Chrétien dans ses bras fraternels,