Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/103

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trente mètres du sol, là où s’étalent enfin les premières branches. Vingt-cinq ou trente mètres d’écorce nue, lisse, de mille teintes.

Boby lève un agouti qui traverse la piste, se projetant en bonds énormes et rapides, roux comme un renard, la queue hérissée. Pas le courage de tirer. On continue… Montagne Ananas, crique, carbet brûlé. Toujours monter, descendre, avec, comme repos, les marécages des contre-bas où l’on patauge.

Traversant une crique sur un arbre, celui-ci, pourri, cède ; le poids du sac me fait tomber sur le dos. Je suis trempé, le sac aussi… Ça ne fait rien, on continue.

Et soudain, une éclaircie. Dans celle-ci, quatre carbets : c’est le lieu de rendez-vous des mineurs de la grève. Nous sommes à moitié chemin. Crotté, fourbu, je me sèche auprès du grand feu que l’on vient d’allumer ; il est tôt encore : à peine trois heures, mais pour aujourd’hui nous n’irons pas plus loin.

Conciliabule chez les porteurs dont l’un ne parle pas du tout français et l’autre, un patois français. Je com prends quelques mots créoles… ils veulent de l’augmentation pour continuer :

Vas-y, demande lui !

— Non, toi !

Finalement, on se décide :

— Patron, y en a avoir beaucoup boulot !

— Oui.

— Nous avoir travaillé fort… deux jours, demain trois… demain pas payé ?

— Non.

Conciliabule…

— Patron…

Je commence à m’énerver :