Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/209

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rouge s’étale en larges gouttes sur les feuilles de cactus épineux.

Grimper à l’arbre ?… Inutile d’y songer ! l’abattre ?… la seule solution ! Mes deux bras l’enlacent à peine et ma hachette est fragile, mais par bonheur, il a poussé légèrement incliné et l’angle du tronc favori sera une chute plus rapide. Torse nu, je peine, travaillant avec ardeur à décrocher mon beefteak, je m’acharne et, morceau par morceau, je creuse le tronc qui sent la résine. Deux heures se passent, j’arrête, je fume, je repose, je sais qu’il va tomber bientôt. Je me remets au travail… quelques craquements, l’écorce se fendille, la base s’entr’ouvre. À grands coups redoublés je frappe la brèche, coupant les derniers bois filandreux et d’un seul coup, l’arbre géant s’abat, entraînant dans sa chute des tas de petits arbres, broyant la forêt, ouvrant une brèche dans un vacarme formidable.

Suivant le tronc enfin couché, j’arrive à l’amas imposant de la cime et, sans souci des fourmis rouges en révolution qui se fourrent partout et brûlent comme la braise, je fouille les branchages, émondant au sabre, explorant l’arbre centimètre par centimètre. Des mouches, affolées de voir leur nid brisé, avides de vengeance, se ruent, me harcèlent atrocement, me forçant presque à la retraite.

Et je taille, et je coupe, et j’arrache ; Boby, de son côté, furette, renifle, s’excite ; je l’encourage, il s’arrête, aboie… je me précipite, je vois un long bras noir… victoire ! le singe est là… mais il est pris sous une branche énorme que j’essaie, sans résultat de pousser. Je tire le bras, ça craque, mais ça résiste. Allons, il faut couper tout cela, et de nouveau, à la hache. C’est long, je m’impatiente… enfin, ça y est, j’ai mon singe.