Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/210

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Oh ! cette impression de victoire, cette joie qui m’envahit et me fait installer l’animal à cheval sur mes épaules, par dessus le sac.

Il pèse au moins quinze kilogs. Qu’importe, je ne sens ni poids ni fatigue ; je marche, je force, car la nuit est proche et je dois trouver une crique, de l’eau. Je sens la faim me presser… pour un peu, j’arrêterais et ferais en vitesse rôtir une patte… Non ! il faut trouver l’eau.

Le sang du couata a trempé la chemise, le sac, il coule dans mon dos, ça poisse, les mouches suivent en procession. La balte 22 long rifle a touché entre les deux yeux ; un coup de hasard providentiel car je visais la poitrine !

Enfin, voici de l’eau, un ruisselet étroit, tranquille, dont le fond de sable roux, sympathique, se colore des dernières lueurs d’un ciel crépusculaire.

Je tends le hamac après avoir débroussé un joli coin entre deux arbres. Je sors mes ustensiles de cuisine, les allumettes, l’encens. Ceci fait, je vais chercher à quelque distance de là de beaux rondins de bois mort, je prépare un bon brasier. Il a tôt fait de flamber. Alors, couvert de bois vert je le fais couver. Quatre fourches sont vite taillées, plantées et couvertes de traverses. Je coupe une bonne provision de feuilles de bananiers sauvages en prévision de la pluie qui ne saurait tarder et de manière à couvrir le boucan. Et maintenant, au dépeçage !

J’amarre le singe à une branche et lui retire la peau, ce qui est fort délicat. Les mouches, arrivées en nombre, m’agacent, disputant le cadavre comme s’il leur appartenait, enfin, elles tiennent bon et moi aussi.