Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/230

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remercié Dieu de sa clémence et, fort soudain de ce miracle, me suis mis à ébrancher, émonder, tailler, hacher. J’ai trois beaux morceaux de trois mètres et quarante centimètres de diamètre ; le reste est débité en traverses. Impossible de le faire plus large, la crique étant étroite et encombrée. Le radeau, à peine ébauché, s’annonce déjà très lourd et ne me porte pas encore…

En débitant le tronc et voyant qu’il était retenu par un jeune arbre qu’il avait écrasé, je me suis mis en devoir de trancher cet arbre et mettre le bois canon complètement à terre. À coups de hache, je commence à l’entamer ; soudain, sous le poids du gros tronc, il cède et, comme un ressort, se relevant à la verticale me cueille au côté droit de l’estomac, me projetant au milieu des broussailles, tordu de douleur, à moitié sans connaissance. Je crois avoir quelques côtes abîmées. Impossible de lever le bras droit ou de respirer profondément. J’ai mis longtemps à récupérer. J’ai davantage de difficulté à continuer le travail et transporter les lourdes traverses du lieu d’abattage à la rivière.

J’ai réuni toutes les cordes que je possède puis j’ai cherché des lianes et j’ai amarré solidement les traverses. Je pense qu’il va me porter… non… oh ! rage, je me sens prisonnier, du Tamouri…

Je vais essayer d’agrandir le radeau, il faudra bien qu’il passe tout de même. J’abats un nouvel arbre, le débite, rajoute un tronçon de trois mètres, couvre le châssis entièrement. J’espère que, cette fois, ça ira. Il ne me reste plus qu’à égaliser les rondins rajoutés et les lier.

Depuis hier matin je n’ai rien mangé sinon trois petits oiseaux et trois minuscules « yayas » pêchés par miracle et dévorés crus avec tripes et arêtes pour faire