Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/231

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plus de poids à mon estomac. Ce soir, je suis allé chasser à nouveau sans résultat. J’ai trouvé des capsules d’ « Awara » que j’ai mis à rôtir. C’est une véritable bourre et ça a le goût du foin. Je pense à Boby, je sens maintenant combien sa muette présence m’était nécessaire. Plus personne au camp, le soir, pour m’accueillir, plus d’aboiements, plus de caresses… je suis seul. Pauvre Boby !

Vendredi 6 Janvier.

Je n’en puis plus. J’ai chassé à nouveau toute la matinée sans résultat… rien, rien, rien. Bois et rivières sont morts, atrocement vides, j’ai l’impression d’évoluer dans un désert immense prêt à m’écraser. Mes forces déclinent de jour en jour. Je me demande parfois comment il se fait que je tienne.

Je m’y prends à dix fois pour lier une traverse… Ah ! comme je me sens las aujourd’hui ; vais-je mourir de faim ici ?

Je fonce à nouveau comme un désespéré, à la chasse, m’enfonçant profondément dans le bois, fouillant les vieilles souches, les troncs creux, explorant les trous, les feuilles, recherchant une tortue, un serpent, un lézard, quelque chose enfin de rampant, car je rampe, je me fourre partout, nu, barbouillé de toiles d’araignées. Évidemment, quand on cherche un serpent pour le manger, impossible de le trouver. Il est là où on s’attend le moins du monde à le découvrir et justement à l’instant précis où on préfèrerait l’éviter. Pas l’ombre, pas la trace d’un seul. Et les tortues… elles qui se sont toujours providentiellement présentées les jours de famine. J’explore chaque mètre de terrain, dans les creux de montagne…