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Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/57

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Lundi 10 Octobre.

Départ à l’aube : des brumes sur le fleuve ; il fait froid ; les cochons dépecés sont empilés dans les canots. Adieux au Saramaca demeuré seul et, après une heure de navigation : « Saut Continent », rapide formé de multiples barres rocheuses importantes et difficiles à franchir nous force à remplacer deux goupilles brisées.

Le bosman, debout à l’avant de l’embarcation, le takari en main, surveille les chenaux étroits dans lesquels nous nous glissons difficilement. Malgré sa vigilance, nous culbutons une roche, le moteur s’emballe. Le Saramaca motoriste s’affole et nous évitons de justesse la catastrophe.

Nous arrêtons à nouveau devant un saut qui semble infranchissable. Les Saramacas se mettent à l’eau et cherchent un passage. Les roches à fleur d’eau sont couvertes de larges feuilles torturées, hérissées de verrues épineuses et noirâtres. Les eaux semblent baisser de jour en jour davantage. Lé paysage devient d’une sauvagerie impressionnante avec des trous d’ombre profonde devant lesquels les lianes blafardes mettent le ruissellement continu d’une mouvante draperie parfois piquée d’un bouquet de fleurs sauvages rouges ou jaunes. Le bruit des eaux glissant _sur les roches usées donne davantage d’intensité au grand silence des bois. Quelle majesté ! la rivière bondissante, parfois un bruit sourd répercuté longuement qui annonce la chute d’un arbre mort, le chant timide d’un oiseau et les nuages qui passent et se reflètent sur le reflet projeté des murs de hautes végétations.

Tout est calme, si calme I Une odeur agréable d’humus et d’eau, de mouises, d’écorces. L’air est saturé du