Page:Maupassant - Au soleil, OC, Conard, 1908.djvu/246

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savante, que je lui offris mon bras comme j'aurais fait à ma femme. Elle le prit avec aisance comme si elle eût été ma femme.

En tête à tête dans le coupée nous sommes restés d'abord immobiles et muets. Puis elle releva sa voilette et sourit... Rien de plus. Un sourire de bon ton. Oh ! je craignais le baiser, la comédie de la tendresse, l'éternel et banal jeu des filles ; mais non, elle s'est tenue. Elle est forte.

Puis nous avons causé un peu comme des jeunes époux, un peu comme des étrangers. C'était gentil. Elle souriait souvent en me regardant. C'est moi maintenant qui avais envie de l'embrasser. Mais je suis demeuré calme.

A la frontière, un fonctionnaire galonné ouvrit brusquement la portière et me demanda :

— Votre nom, monsieur ?

Je fus surpris. Je répondis :

— Marquis de Roseveyre.

— Vous allez ?

— Aux eaux de Loëche, dans le Valais.

Il écrivait sur un registre. Il reprit :

— Madame est votre femme ?

Que faire ? Que répondre ? je levai les