Page:Maupassant - Au soleil, OC, Conard, 1908.djvu/280

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leurs vagues toujours furieuses, chavirant les navires et les avalant comme des dragées.


Ô flots, que vous savez de lugubres histoires,
Flots profonds redoutés des mères à genoux.


Plus d'arbres, plus rien que des touffes de gazon sur le grand cap qui s'avance. Tout au bout deux phares, et partout au loin d'autres phares, piqués sur des écueils. Il en est un qu'on essaie en vain de terminer depuis dix ans. La mer, acharnée, détruit, à mesure qu'il s'accomplit, le travail acharné des hommes.

Là-bas, en face, l'île de Sein, l'île sacrée, regarde à l'horizon, derrière la rade de Brest, sa dangereuse commère, l'île d'Ouessant.


Qui voit Ouessant
Voit son sang,


disent les matelots. L'île d'Ouessant, la plus inaccessible de toutes, celle que les marins n'abordent qu'en tremblant.

Le haut promontoire se termine soudain, tombe à pic dans cette bataille d'océans. Mais un petit sentier le contourne, rampant sur les granits inclinés, filant sur des crêtes larges comme la main.