Page:Maupassant - Bel-Ami, OC, Conard, 1910.djvu/59

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devenant familière, elle posait la main sur son bras, baissait la voix pour dire des riens, qui prenaient ainsi un caractère d’intimité. Il s’exaltait intérieurement à frôler cette jeune femme qui s’occupait de lui. Il aurait voulu tout de suite se dévouer pour elle, la défendre, montrer ce qu’il valait ; et les retards qu’il mettait à lui répondre indiquaient la préoccupation de sa pensée.

Mais tout à coup, sans raison, Mme de Marelle appela : « Laurine ! » et la petite fille s’en vint.

— Assieds-toi là, mon enfant, tu aurais froid près de la fenêtre.

Et Duroy fut pris d’une envie folle d’embrasser la fillette, comme si quelque chose de ce baiser eût dû retourner à la mère.

Il demanda d’un ton galant et paternel :

— Voulez-vous me permettre de vous embrasser, mademoiselle ?

L’enfant leva les yeux sur lui d’un air surpris. Mme de Marelle dit en riant :

— Réponds : « Je veux bien, monsieur, pour aujourd’hui ; mais ce ne sera pas toujours comme ça. »

Duroy, s’asseyant aussitôt, prit sur son genou Laurine, puis effleura des lèvres les cheveux ondés et fins de son front.

La mère s’étonna :