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« Au nom de la loi, je vous arrête ! » hurla l’officier de l’état civil, et il entraîna l’ecclésiastique désespéré et la bonne éplorée, tandis que le garde champêtre ramassait, comme pièces à conviction, le morceau que venait de perdre le générateur du genre humain, plus la lanterne et le marteau.

De longues entrevues eurent lieu entre l’évêque et un préfet conciliant pour étouffer cette grave affaire.


*


Autre conflit.

Plusieurs journaux plaçaient dernièrement sous nos yeux la lettre indignée d’un brave curé à l’instituteur de son pays, pour sommer ce maître d’école de déclarer si oui ou non, il avait traité l’Histoire Sainte de blagues.

Les journaux religieux se sont fâchés ; les journaux libéraux ont argumenté doctoralement.

Or, la question me paraît délicate et difficile.

D’après la nouvelle loi, il semble interdit aux instituteurs d’enseigner l’histoire sainte. Qui donc l’enseignera ? — Personne. — Alors, les enfants ne la sauront jamais.

Mais si l’instituteur est autorisé à exposer les aventures de ce recueil d’anecdotes merveilleuses qu’on appelle l’Ancien Testament, peut-on exiger qu’il donne comme articles de foi la création du monde en six jours, l’arrêt du soleil par Josué, la destruction musicale des murs de Jéricho, la promenade de Jonas dans l’intérieur mystérieux d’une baleine, etc. ?