Page:Maupassant - Fort comme la mort.djvu/318

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herbes. Quand ils passèrent devant la maison des Guilleroy, le peintre leva les yeux. Des lumières semblaient briller aux fenêtres, derrière des fentes de rideaux. Le soupçon lui vint que la duchesse et son neveu avaient été peut-être invités à venir boire une tasse de thé. Et une rage le crispa qui le fit souffrir atrocement.

Il serrait toujours le bras de Musadieu, et il activait parfois d’une contradiction ses opinions sur la jeune future marquise. Cette voix banale qui parlait d’elle faisait voltiger son image dans la nuit autour d’eux.

Quand ils arrivèrent, avenue de Villiers, devant la porte du peintre :

— Entrez-vous ? demanda Bertin.

— Non, merci. Il est tard, je vais me coucher.

— Voyons, montez une demi-heure, nous allons encore bavarder.

— Non. Vrai. Il est trop tard !

La pensée de rester seul, après les secousses qu’il venait encore de supporter, emplit d’horreur l’âme d’Olivier. Il tenait quelqu’un, il le garderait.

— Montez donc, je vais vous faire choisir une étude que je veux vous offrir depuis longtemps.

L’autre sachant que les peintres n’ont pas toujours l’humeur donnante, et que la mémoire des promesses est courte, se jeta sur l’occasion. En sa