Page:Maupassant - Fort comme la mort.djvu/343

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— Ne vous tourmentez pas, ma chère. Avant une heure je serai de retour et vous pourrez rentrer chez nous.

Lorsqu’ils furent partis, elle écouta le bruit de la porte d’en bas qu’on refermait, puis le roulement du coupé s’éloignant dans la rue.

Le domestique et la cuisinière étaient demeurés dans la chambre, attendant des ordres. La comtesse les congédia.

— Retirez-vous, leur dit-elle, je sonnerai si j’ai besoin de quelque chose.

Ils s’en allèrent aussi et elle demeura seule auprès de lui.

Elle était revenue tout contre le lit, et, posant ses mains sur les deux bords de l’oreiller, des deux côtés de cette tête chérie, elle se pencha pour la contempler. Puis elle demanda, si près du visage qu’elle semblait lui souffler les mots sur la peau :

— C’est vous qui vous êtes jeté sous cette voiture ?

Il répondit en essayant toujours de sourire :

— Non, c’est elle qui s’est jetée sur moi.

— Ce n’est pas vrai, c’est vous.

— Non, je vous affirme que c’est elle.

Après quelques instants de silence, de ces instants où les âmes semblent s’enlacer dans les regards, elle murmura :