Page:Maupassant - L'adultère (extrait de Le Gaulois, édition du 1882-01-23).djvu/10

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tale est devenue bien rare ; les procès en séparation dénouent les situations trop difficiles, en attendant le divorce.

Dans le peuple, on retrouve, à part quelques violences de passionnés, la même indifférence tranquille. Les extrêmes se touchent, dit-on. L’homme de la nature, avec son seul instinct, n’a point encore les susceptibilités que créent chez nous les conventions passées à l’état de religions ; de même que chez le raffiné, devenu sceptique, les croyances à mille choses sont usées. Quiconque vit, par hasard, quelque temps au milieu du peuple reste abasourdi de la promiscuité des ménages, où l’inceste est presque aussi fréquent que l’adultère. Rapprochons cela de ce que les mémoires secrets nous racontent de Louis XV et du mot, rapporté par Mme  de Rémusat, de Napoléon Ier à sa mère : « Eh ! ma mère, est-ce que votre morale est faite pour des hommes comme moi ? » Si ce ne sont point les paroles textuelles, c’est au moins le sens exact.

Dans la bourgeoisie moyenne, au contraire, tout cela change. L’adultère, tout aussi fréquent, est beaucoup plus grave ; le drame est au bout des liaisons d’amour ; les maris attardés, à embuscades et à revolvers, se trouvent bien plus fréquemment que dans la classe au-dessus et dans la classe au-dessous.

Mais c’est aussi dans la bourgeoisie moyenne qu’on rencontre le plus souvent ces étonnants ménages à trois qui ont toujours fait et feront toujours la stupéfaction et la joie des spectateurs.