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Page:Maupassant - La Main gauche, OC, Conard, 1910.djvu/257

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L’ENDORMEUSE.

mois, nourris au coin des bornes comme les chiens des rues ; des femmes en haillons, décharnées, qui sont malades, paralysées, incapables de trouver leur vie et qui nous disent, après avoir raconté leur cas : « Vous voyez bien que ça ne peut pas continuer, puisque je ne peux plus rien faire et rien gagner, moi ». J’en ai vu venir une de quatre-vingt-sept ans, qui avait perdu tous ses enfants et petits-enfants, et qui, depuis six semaines, couchait dehors. J’en ai été malade d’émotion. Puis, nous avons tant de cas différents, sans compter les gens qui ne disent rien et qui demandent simplement : « Où est-ce ? » Ceux-là, on les fait entrer, et c’est fini tout de suite.

Je répétai, le cœur crispé :

— Et… où est-ce ?

— Ici.

Il ouvrit une porte en ajoutant :

— Entrez, c’est la partie spécialement réservée aux membres du cercle, et celle qui fonctionne le moins. Nous n’y avons eu encore que onze anéantissements.

— Ah ! vous appelez cela un… anéantissement.

— Oui, monsieur. Entrez donc.

J’hésitais. Enfin j’entrai. C’était une déli-