Page:Maupassant - Le Horla, OC, Conard, 1909.djvu/120

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aurait dit qu’ils étaient prévenus par quelque chose en approchant de la maison, qu’ils la flairaient comme les chiens flairent le gibier, car ils levaient soudain la tête et échangeaient bien vite un regard avec elle, un regard de franc-maçon. Le sien disait : « Voulez-vous ? »

Le leur répondait : « Pas le temps », ou bien : « Une autre fois », ou bien : « Pas le sou », ou bien : « Veux-tu te cacher, misérable ! » C’étaient les yeux des pères de famille qui disaient cette dernière phrase.

Tu ne te figures pas comme c’était drôle de la voir faire son manège ou plutôt son métier.

Quelquefois elle fermait brusquement la fenêtre et je voyais un monsieur tourner sous la porte. Elle l’avait pris, celui-là, comme un pêcheur à la ligne prend un goujon. Alors je commençais à regarder ma montre. Ils restaient de douze à vingt minutes, jamais plus. Vraiment, elle me passionnait, à la fin, cette araignée. Et puis elle n’était pas laide, cette fille.

Je me demandais : Comment fait- elle pour se faire comprendre si bien, si vite, complètement. Ajoute-t-elle à son regard un signe de tête ou un mouvement de main ?

Et je pris ma lunette de théâtre pour me rendre compte de son procédé. Oh ! il était