Page:Maupassant - Le Horla, OC, Conard, 1909.djvu/78

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sans l’offenser, pour chiper les places des autres.

Donc, sûr de mon endroit, j’y revenais comme un propriétaire. A peine arrivé, le samedi, je montais dans Dalila, avec mon épouse. — Dalila c’est ma norvégienne, un bateau que j’ai fait construire chez Fournaise, quéque chose de léger et de sûr. — Je dis que nous montons dans Dalila, et nous allons amorcer. Pour amorcer, il n’y a que moi, et ils le savent bien, les camaraux. — Vous me demanderez avec quoi j’amorce ? Je n’peux pas répondre. Ça ne touche point à l’accident ; je ne peux pas répondre, c’est mon secret. — Ils sont plus de deux cents qui me l’ont demandé. On m’en a offert des petits verres, et des fritures, et des matelotes pour me faire causer !! Mais va voir s’ils viennent, les chevesnes. Ah ! oui, on m’a tapé sur le ventre pour la connaître, ma recette... Il n’y a que ma femme qui la sait... et elle ne la dira pas plus que moi !... Pas vrai, Mélie ?...

Le président l’interrompit.

— Arrivez au fait le plus tôt possible. Le prévenu reprit :

— J’y viens, j’y viens. Donc le samedi 8 juillet, parti par le train de cinq heures vingt-cinq, nous allâmes, dès avant dîner, amorcer comme tous les samedis. Le temps