Page:Maupassant - Les Sœurs Rondoli.djvu/112

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éperdu que je n’avais plus une pensée, prêt à tomber.

Mais je suis un homme de sang-froid, et tout de suite la raison me revint. Je songeai : « Je viens d’avoir une hallucination, voilà tout. » Et je réfléchis immédiatement sur ce phénomène. La pensée va vite dans ces moments-là.

J’avais une hallucination — c’était là un fait incontestable. Or, mon esprit était demeuré tout le temps lucide, fonctionnant régulièrement et logiquement. Il n’y avait donc aucun trouble du côté du cerveau. Les yeux seuls s’étaient trompés, avaient trompé ma pensée. Les yeux avaient eu une vision, une de ces visions qui font croire aux miracles les gens naïfs. C’était là un accident nerveux de l’appareil optique, rien de plus, un peu de congestion peut-être.

Et j’allumai ma bougie. Je m’aperçus, en me baissant vers le feu, que je tremblais, et je me relevai d’une secousse, comme si on m’eût touché par derrière.

Je n’étais point tranquille, assurément.

Je fis quelques pas ; je parlai haut. Je chantai à mi-voix quelques refrains.

Puis je fermai la porte de ma chambre à double