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LOUIS BOUILHET




Mercredi dernier, est arrivée, en gare de Rouen, une caisse portant comme adresse : « À monsieur le président du comité Bouilhet », puis plus bas : « Envoi de M. Guillaume. »

C’était le buste du poète mort, voici treize ans maintenant, et dont on va inaugurer le monument dans quelques jours.

Toute la presse va donc répéter ce nom ; on rappellera ses œuvres si admirées des lettrés et peu lues maintenant du public ; on racontera sa vie, on réveillera sa gloire. Je veux, un des premiers, reparler du poète gracieux et puissant que j’ai connu, que j’ai aimé, et que j’ai vu dans l’intimité de sa vie.

Un autre jour, quand aura lieu la cérémonie d’inauguration, je m’occuperai de son œuvre, et je pourrai peut-être citer quelques pièces ou quelques fragments absolument inédits. Aujourd’hui je raconterai l’homme en quelques lignes, mêlant à mes souvenirs personnels les choses que j’ai sues de lui par son plus intime ami, Gustave Flaubert.

J’avais alors dix-huit ans, et je faisais ma rhétorique à Rouen. Je n’avais rien lu de Bouilhet, bien qu’il fût le plus cher camarade de Flaubert.