Page:Maupassant - Mademoiselle Fifi, Ollendorff, 1902.djvu/103

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
90
MARROCA

Mais je me relevai d’un bond ; une chose froide gisait sous moi, et comme je n’étais pas plus vêtu que ma complice, le contact m’avait saisi. Je me retournai.

Je venais de m’asseoir sur une petite hachette à fendre le bois, aiguisée comme un couteau. Comment était-elle venue à cette place ! Je ne l’avais pas aperçue en entrant.

Marroca, voyant mon sursaut, étouffait de gaîté, poussait des cris, toussait, les deux mains sur son ventre.

Je trouvai cette joie déplacée, inconvenante. Nous avions joué notre vie stupidement ; j’en avais encore froid dans le dos, et ces rires fous me blessaient un peu.

« Et si ton mari m’avait vu », lui demandai-je.

Elle répondit : — « Pas de danger.

— Comment ! pas de danger. Elle est raide celle-là ! Il lui suffisait de se baisser pour me trouver. »

Elle ne riait plus ; elle souriait seulement en me regardant de ses grands yeux fixes, où germaient de nouveaux désirs.

« Il ne se serait pas baissé. »

J’insistai. — « Par exemple ! S’il avait seulement laissé tomber son chapeau, il aurait bien fallu le