Page:Maupassant - Mont-Oriol, éd. Conard, 1910.djvu/98

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couler. J’en ai jamais vu d’ plus belle, jamais, jamais !

Il se tut quelques secondes et reprit :

— Ché n’est pas pour faire l’article que je dis cha ! pour chûr non. J’ voudrais faire l’épreuve d’vant vous, la vraie épreuve, pas votre épreuve de pharmachien, mais l’épreuve sur un malade. Je parie qu’elle guérirait un paralytique, chelle-là, tant qu’elle est chaude et bonne de goût, je l’ parie !

Il parut chercher dans sa tête, puis regarder au sommet des monts voisins s’il ne découvrirait pas le paralytique désiré. Ne l’ayant point découvert, il abaissa ses yeux sur la route.

À deux cents mètres de là, on distinguait au bord du chemin, les deux jambes inertes du vagabond dont le corps était caché par le tronc du saule.

Oriol mit sa main en abat-jour sur son front et demanda à son fils :

— Ch’est pas l’ païrè Cloviche qu’est encore là ?

Colosse répondit en riant :

— Oui, oui. Ch’est lui, il n’ s’en va pas chi vite qu’un lièvre.

Alors Oriol fit un pas vers Andermatt, et avec une conviction grave et profonde :

— T’nez, monchieu, écoutez-moi. En v’la