Page:Maupassant - Mont-Oriol, 1887.djvu/156

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elle eut cette ruse pour lui prendre les mains :

— Levez-vous et relevez-moi ; je suis engourdie à ne plus remuer.

Il se dressa, la saisit par les poignets et l’attirant, la mit debout, sur le bord de la route, tout contre lui. Elle vit sa bouche balbutier : « Je vous aime » et elle se détourna vite pour ne pas lui répondre aussi ces trois mots qui lui montaient aux lèvres malgré elle dans un élan qui la jetait vers lui.

Ils retournèrent vers l’hôtel.

L’heure du bain était passée. On attendit celle du déjeuner. Elle sonna, mais Andermatt ne revenait point. Après un nouveau tour dans le parc on résolut donc de se mettre à table. Le repas, bien que long, se termina sans que le banquier parût. On redescendit pour s’asseoir sous les arbres. Et les heures, l’une après l’autre, s’en allaient, le soleil glissait sur les feuillages, s’inclinant vers les monts, le jour s’écoulait, Will ne se montrait point.

Tout à coup on l’aperçut. Il marchait vite, le chapeau à la main, en s’épongeant le front, la cravate de côté, le gilet entr’ouvert, comme après un voyage, après une lutte, après un effort terrible et prolongé.

Dès qu’il vit son beau-père, il s’écria :

— Victoire ! c’est fait ! mais quelle journée, mes amis ! Ah ! le vieux renard, m’en a-t-il donné du mal !

Et tout de suite il expliqua ses démarches et ses peines.