Page:Maupassant - Mont-Oriol, 1887.djvu/234

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La duchesse disait à Christiane, en parlant de lui :

— C’est un homme merveilleux, chère Madame, il sait tout, il fait tout. C’est à lui que je dois ma taille.

— Comment, votre taille ?

— Oui, je commençais à engraisser et il m’a sauvée avec son régime et ses liqueurs.

Il savait, d’ailleurs, rendre intéressante la médecine elle-même tant il en parlait avec aisance, avec gaîté et avec un scepticisme léger qui lui servait à convaincre ses auditeurs de sa supériorité.

— C’est bien simple, disait-il, je ne crois pas aux remèdes. Ou plutôt je n’y crois guère. La vieille médecine partait de ce principe qu’il y a remède à tout. Dieu, croyait-on, dans sa divine mansuétude avait créé des drogues pour tous les maux, seulement il avait laissé aux hommes, par malice peut-être, le soin de découvrir ces drogues. Or, les hommes en ont découvert un nombre incalculable sans jamais savoir au juste à quel mal convient chacune. En vérité, il n’y a pas de remèdes ; il y a seulement des maladies. Quand une maladie se déclare, il faut en interrompre le cours suivant les uns, le précipiter, suivant les autres, par un moyen quelconque. Chaque école préconise son procédé. Dans le même cas, on voit employer les méthodes les plus contraires et les médications les plus opposées : la glace par l’un et l’extrême chaleur par l’autre, la diète par celui-ci et la nourriture forcée