Page:Maupassant - Mont-Oriol, 1887.djvu/305

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— Eh bien, je lui ai déclaré que je l’adorais et que je serais enchanté de l’épouser.

— Et elle a dit ?

— Elle a dit avec une prudence très gentille :

— Cela regarde mon père. C’est à lui que je répondrai.

— Alors tu vas ?

— Charger tout de suite mon ambassadeur Andermatt de la demande officielle. Et si le vieux rustre fait quelque mine, je compromets la fille par un éclat.

Et comme Andermatt causait encore avec le docteur Latonne sur la terrasse du Casino, Gontran les sépara et mit aussitôt son beau-frère au fait de la situation.

Paul s’en alla sur la route de Riom. Il avait besoin d’être seul, tant il se sentait envahi par cette agitation de toute la pensée et de tout le corps que jette en nous chaque rencontre d’une femme qu’on est sur le point d’aimer.

Depuis quelque temps déjà il subissait, sans s’en rendre compte, le charme pénétrant et frais de cette fillette abandonnée. Il la devinait si gentille, si bonne, si simple, si droite, si naïve, qu’il avait été d’abord ému de compassion, de cette compassion attendrie que nous inspire toujours le chagrin des femmes. Puis, la voyant souvent, il avait laissé germer dans son cœur cette graine, cette petite graine de tendresse qu’elles sèment en nous si vite, et qui pousse si grande. Et maintenant, depuis une