Page:Maupassant - Mont-Oriol, 1887.djvu/316

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petite, la plaindre, regretter que son frère l’eût sacrifiée, et désirer qu’un homme, un brave cœur, la comprît, l’aimât et l’épousât.

Il disait :

— Oh ! oui, Gontran a fait là une sottise. Elle est tout à fait charmante, cette enfant.

Christiane, sans défiance, répétait :

— Tout à fait charmante. C’est une perle ! une perfection !

Jamais elle n’eût songé qu’un homme comme Paul pouvait aimer une fillette et pourrait se marier un jour. Elle ne redoutait que ses maîtresses.

Et, par un bizarre phénomène du cœur, l’éloge de Charlotte, dans la bouche de Christiane, prenait pour lui une valeur extrême, excitait son amour, fouettait son désir, enveloppait la jeune fille d’un irrésistible attrait.

Or, un jour, comme il entrait avec Gontran chez Mme Honorat pour y rencontrer les petites Oriol, ils trouvèrent le docteur Mazelli, installé là, comme chez lui.

Il tendit ses deux mains aux deux hommes, avec son sourire italien qui semblait donner tout son cœur avec chaque parole et chaque geste.

Gontran et lui s’étaient liés d’une amitié familière et futile, faite d’affinités secrètes, de similitudes cachées, d’une sorte de complicité d’instincts, bien plus que d’affection vraie et de confiance.

Le comte demanda :

— Et votre jolie blonde du bois Sans-Souci ?