Page:Maupassant - Mont-Oriol, 1887.djvu/317

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L’Italien sourit :

— Bah ! nous sommes en froid. C’est une de ces femmes qui offrent tout et ne donnent rien.

Et on se mit à causer. Le beau médecin faisait des frais pour les jeunes filles, pour Charlotte surtout. Il montrait, en parlant aux femmes, une adoration perpétuelle dans la voix, le geste et le regard. Toute sa personne, des pieds à la tête, leur disait : « Je vous aime ! » avec une éloquence d’attitude qui les lui gagnait infailliblement.

Il avait des grâces d’actrice, des pirouettes légères de danseuse, des mouvements souples d’escamoteur, toute une science de séduction naturelle et voulue dont il usait d’une façon continue.

Paul, revenant à l’hôtel avec Gontran, s’écria, d’un ton d’humeur maussade :

— Qu’est-ce que ce charlatan venait faire dans cette maison ?

Le comte répondit doucement :

— Sait-on jamais, avec ces aventuriers ? Ce sont des gens qui se glissent partout. Celui-là doit être las de sa vie vagabonde, d’obéir aux caprices de son Espagnole dont il est plutôt le valet que le médecin et peut-être plus encore. Il cherche. La fille du professeur Cloche était bonne à prendre ; il l’a ratée, dit-il. La seconde fille des Oriol ne serait pas moins précieuse pour lui. Il essaye, il tâte, il flaire, il sonde. Il deviendrait copropriétaire des eaux, tâcherait de culbuter cet imbécile de Latonne, se ferait en tout cas ici, chaque été, une excellente clientèle