Page:Maupassant - Mont-Oriol, 1887.djvu/318

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

pour l’hiver… Parbleu ! c’est son plan, va… n’en doutons pas.

Une colère sourde, une inimitié jalouse s’éveillait dans le cœur de Paul.

Une voix criait : « Hé ! hé ! » C’était Mazelli qui les rejoignait.

Brétigny lui dit, avec une ironie agressive :

— Où courez-vous si vite, Docteur, on dirait que vous poursuivez la fortune ?

L’Italien sourit, et sans s’arrêter, mais sautillant à reculons, il enfonça, d’un geste gracieux de mime, ses deux mains dans ses deux poches, les retourna vivement et les montra, vides l’une et l’autre, en les écartant entre deux doigts par l’extrémité des coutures. Puis il dit : « Je ne la tiens pas encore. »

Et pivotant sur ses pointes avec élégance il se sauva comme un homme très pressé.

Les jours suivants ils le trouvèrent plusieurs fois chez le docteur Honorat, où il se rendait utile aux trois femmes par mille services menus et gentils, par les mêmes qualités d’adresse dont il s’était servi, sans doute, auprès de la duchesse. Il savait tout faire en perfection, depuis les compliments jusqu’au macaroni. Il était d’ailleurs excellent cuisinier et, préservé des taches par un tablier bleu de servante, coiffé d’un bonnet de chef en papier, chantant en italien des chansons napolitaines, il marmitonnait avec esprit sans être ridicule en rien, amusant et séduisant tout le monde, jusqu’à la bonne imbécile qui disait de lui : « C’est un Jésus ! »