Page:Maupassant - Pierre et Jean, Ollendorff, 1888.djvu/147

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chal, que nous connaissions encore très peu, nous a été d’un grand secours.

Roland s’écria :

— C’est vrai, c’est vrai, il a été admirable, même ! Comme ta mère n’en pouvait plus de fatigue et que moi j’étais occupé à la boutique, il allait chez le pharmacien chercher tes médicaments. Vraiment, c’était un brave cœur. Et quand tu as été guéri, tu ne te figures pas comme il fut content et comme il t’embrassait. C’est à partir de ce moment-là que nous sommes devenus de grands amis.

Et cette pensée brusque, violente, entra dans l’âme de Pierre comme une balle qui troue et déchire : « Puisqu’il m’a connu le premier, qu’il fut si dévoué pour moi, puisqu’il m’aimait et m’embrassait tant, puisque je suis la cause de sa grande liaison avec mes parents, pourquoi a-t-il laissé toute sa fortune à mon frère et rien à moi ? »

Il ne posa plus de questions et demeura sombre, absorbé plutôt que songeur, gardant en lui une inquiétude nouvelle, encore indé-