Page:Maupassant - Sur l'eau, 1888.djvu/107

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Le rossignol, caché dans son nid ténébreux,
Chanta comme un poète et comme un amoureux.
Chacun se dispersa sous les profonds feuillages ;
Les folles, en riant, entraînèrent les sages ;
L’amante s’en alla dans l’ombre avec l’amant ;
Et troublés comme on l’est en songe, vaguement,
Ils sentaient par degrés se mêler à leur âme,
À leurs discours secrets, à leurs regards de flamme,
À leurs cœurs, à leurs sens, à leur molle raison,
Le clair de lune bleu qui baignait l’horizon.


Et je me rappelle aussi cette admirable prière à la lune qui ouvre le onzième livre de l’Ane d’Or d’Apulée.

Mais ce n’est point assez pourtant que toutes ces chansons des hommes pour mettre en notre cœur la tristesse sentimentale que ce pauvre astre nous inspire.

Nous plaignons la lune, malgré nous, sans savoir pourquoi, sans savoir de quoi, et, pour cela, nous l’aimons.

La tendresse que nous lui donnons est mêlée aussi de pitié ; nous la plaignons comme une vieille fille, car nous devinons vaguement, malgré les poètes, que ce n’est point une morte, mais une vierge.