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YVETTE.

— Ma pauvre petite, ma pauvre petite, si tu savais comme tu me fais mal.

Et elles pleurèrent toutes deux, très longtemps.

Puis la marquise, chez qui le chagrin ne tenait pas, se releva doucement. Et elle dit tout bas :

— Allons, mignonne, c’est comme ça, que veux-tu ? On n’y peut rien changer maintenant. Il faut prendre la vie comme elle vient.

Yvette continuait de pleurer. Le coup avait été trop rude et trop inattendu pour qu’elle pût réfléchir et se remettre.

Sa mère reprit :

— Voyons, lève-toi, et viens déjeuner, pour qu’on ne s’aperçoive de rien.

La jeune fille faisait « non » de la tête, sans pouvoir parler ; enfin, elle prononça d’une voix lente, pleine de sanglots :

— Non, maman, tu sais ce que je t’ai dit, je ne changerai pas d’avis. Je ne sortirai pas de ma chambre avant qu’ils soient partis. Je ne veux plus voir personne de ces gens-là, jamais, jamais. S’ils reviennent, je… je… tu ne me reverras plus.

La marquise avait essuyé ses yeux, et, fatiguée d’émotion, elle murmura :