Page:Maupassant - Yvette.djvu/55

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voulez. Je laisse de côté l’armée des soupirants vulgaires, je ne prends que les principaux : du prince Kravalow ?

À ce nom, Yvette se réveilla :

— Mon pauvre Muscade, y songez-vous ! Mais le prince a l’air d’un Russe de musée de cire, qui aurait obtenu des médailles dans des concours de coiffure.

— Bon. Supprimons le prince ; vous avez donc distingué le vicomte Pierre de Belvigne.

Cette fois, elle se mit à rire et demanda :

— Me voyez-vous pendue au cou de Raisiné (elle le baptisait, selon les jours, Raisiné, Malvoisie, Argenteuil, car elle donnait des surnoms à tout le monde) et lui murmurer dans le nez : Mon cher petit Pierre, ou mon divin Pédro, mon adoré Piétri, mon mignon Pierrot, donne ta bonne grosse tête de toutou à ta chère petite femme qui veut l’embrasser.

Servigny annonça :

— Enlevez le Deux. Reste le chevalier Valreali, que la marquise semble favoriser.

Yvette retrouva toute sa joie :

— Larme-à-l’Œil ? mais il est pleureur à la Madeleine. Il suit les enterrements de première classe. Je me crois morte toutes les fois qu’il me regarde.