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Page:Maurel - L Orniere.djvu/29

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II

L’automne normand, qui n’atteint souvent qu’en décembre sa plénitude ardente, régnait sur toute la vallée, quand Reine sortit, cet après-midi-là, enroulée dans un plaid écossais, son stick à la main, Bill, son petit Fox blanc aux talons.

Tous les jours passés depuis l’armistice n’avaient fait que renforcer la vérité cruelle de ses paroles de ce jour-là. Et, après avoir laissé sa mère un peu enrhumée au coin de son feu de bois, avec son livre et son tricot, elle se répétait encore une fois toutes les raisons qu’elle avait de presque désespérer.

D’ailleurs, sa mère finissait par en être convaincue, et ne lui opposait que ces faibles arguments qu’on se croit obligé de faire entre proches. Ne tenait-elle pas les comptes, dernier vestige d’une autorité maintenant passée entre les mains de la plus jeune, de la plus forte ? Et il lui fallait voir que Réaumont, trop lourd pour leurs épaules, les feraient bientôt succomber.

— C’est un capital, pourtant, c’est un capital ! se répétait la grande fille en gagnant à pas découragés le chemin qui coupe la vallée pour remonter vers Grainetot. Ça doit fructifier, un capital. Et si la ferme était louée à son prix, ou si les prairies