Page:Maurice Joly - Les Affames - E Dentu Editeur - 1876.djvu/242

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Il s’agissait donc pour Ferminet de défendre Doubledent tout en essayant de le faire servir à ses desseins. C’est pour cela qu’il avait fait prendre le change à M. Bonafous en lui représentant l’agent d’affaires comme un homme capable de livrer les secrets de d’Havrecourt ; mais il savait fort bien que Doubledent ne se prêterait pas à un pareil rôle, non pas à cause de son pacte avec le vicomte, que Ferminet ignorait, mais à cause de la répugnance déclarée de Doubledent pour tout ce qui touchait à la politique.

L’agent d’affaires pensait, non sans raison, que, pouvant un jour ou l’autre avoir affaire avec la justice, il serait plus que malavisé de se mêler de choses qui ne le regardaient pas. Pour arriver à ses fins, Ferminet avait donc dû faire de la tactique avec son ami.

Il lui avait fait part de la démarche de M. de Marcus auprès du préfet de police, de la mission qu’il avait reçue lui-même de fournir des renseignements sur son compte à lui Doubledent, toutes choses qui avaient fait ouvrir à Doubledent de grandes oreilles.

Surpris par cette révélation, l’agent d’affaires n’avait pas poussé la franchise jusqu’à raconter à Ferminet ses projets avec d’Havrecourt ; mais la conversation était tombé sur ce dernier, et Ferminet avait recueilli divers renseignements qui pouvaient le guider dans ses recherches. Enfin il avait appris par un des agents de la préfecture, qui était commissionnaire au coin de la rue de Lille, que le comte de B*** devait partir dans la soirée.

Tout cela était encore bien vague, lorsque, le soir même de la représentation de l’Opéra, du Clocher épiant les allures du comte de B***, avait surpris, comme on se le rappelle, entre le comte de B*** et son