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des Champs-Élysées dont l’isolement avait paru favorable pour les délibérations d’un petit comité qui préparait en secret la candidature de Gaspard pour les élections générales qui devaient avoir lieu dans trois mois.

— Tiens, c’est le marquis, fit Georges en allant à lui.

Le marquis mit son pince-nez.

— Je ne vous remets pas, dit-il avec le ton impertinent qui lui était habituel, à moins que vous ne soyez l’homme au coffret du ministère de l’intérieur.

Georges recula en portant la main à son revolver. Ainsi déjà d’Havrecourt avait parlé, et dans le cercle de ses amis Georges était signalé comme l’auteur d’une infâme trahison payée par la police ! Le marquis avait tourné les talons.

— Je devais m’y attendre, fit Georges ; mais je ne pensais pas que ce serait de si tôt. Puis, repoussant son revolver dans sa poche : Bah ! j’ai mieux à faire en ce moment qu’à jeter ma poudre aux moineaux.

Il entra chez la comtesse de Tolna, qui occupait tout le premier étage d’une magnifique maison située avenue Gabrielle. Il sonna.

— Madame est sortie, lui dit un valet de chambre en culotte courte.

— Où est Mlle Rebecca ? dit Georges.

C’était le nom de la camériste.

— Monsieur, madame ne reçoit pas, dit la femme de chambre, en reconnaissant le jeune homme.

— Dites-lui que c’est le monsieur au coffret, fit Georges en pénétrant dans une pièce d’attente et en s’asseyant froidement sur une causeuse.

La femme de chambre, fort belle fille, à l’œil plein de ruses, au type judaïque très prononcé, le regardait