Page:Maurice Joly - Les Affames - E Dentu Editeur - 1876.djvu/333

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quand je pouvais le penser ; mais de funestes relations vous ont perdu ; d’indignes amitiés et de non moins indignes amours vous ont amené à renier tous vos principes ; les propositions que vous m’avez faites depuis dans votre intérêt personnel pour le règlement des droits de succession de Karl Elmerich, ne me permettent pas de continuer mes rapports avec vous. C’est un pacte de spoliation que vous m’offrez.

» Quant à votre espoir d’épouser Mlle  de Nerval, qui détient la succession de Karl, je le considère comme chimérique.

» En tout cas, ne comptez en rien sur mon concours.

» J’ai l’honneur de vous saluer.

» A. Doubledent. »

Karl Elmerich demeura pétrifié : cette lettre était adressée à M. Georges Raymond, avocat à la Cour impériale, rue Jacob, 40. Comment se trouvait-elle là ?

Elle était évidemment tombée de sa poche lorsqu’il était venu voir Karl dans la matinée. Le cachet d’affranchissement qui se trouvait au dos, le timbre de la poste, l’adresse indiquée sur cette lettre parvenue régulièrement au destinataire, tout cela frappa Karl Elmerich comme une affreuse mais palpable réalité.

Comment eût-il deviné de plein saut l’infernale invention de Doubledent ? Il tomba foudroyé sur un siège. Il se rappela alors, comme dans un cauchemar, les paroles cauteleuses de Lecardonnel et d’Ecoiffier, les réticences de Georges Raymond.

— Qui est, en effet, en possession de cette succession ? Il ne me l’a jamais fait connaître, pensa-t-il. Ce