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— Ce que tu es crampon ! On parlera de cela quand le moment sera venu.

— Le moment est venu.

— Alors, entrons au manoir. »

Ce manoir n’avait pas grand style, simple maison basse, flanquée de deux ailes, recouverte d’un crépi blanchâtre et coiffée d’un toit trop petit.

Deux gendarmes déambulaient devant ses portes et ses fenêtres.

Un large vestibule, d’où partait un escalier à rampe de fer forgé, séparait la salle à manger des deux salons et du billard. Aussitôt après le meurtre, on avait transporté la victime dans un de ces salons, et le corps demeurait là, étendu sous son suaire, entouré de cierges allumés et veillé par deux femmes du pays. Bertrande Guercin priait, à genoux, vêtue de noir.

Béchoux lui dit quelques mots à l’oreille. Bertrande passa dans l’autre salon où il lui présenta Raoul d’Avenac.

« Mon ami… mon meilleur ami… Je vous ai souvent parlé de lui… Il nous aidera. »

Elle ressemblait à Catherine, plus belle que sa sœur peut-être, avec un charme égal, mais un visage abîmé déjà par les peines, et quelque chose de tragique dans le regard, où l’on devinait toute l’horreur du crime commis.

Raoul s’inclina.

« Si votre chagrin peut être atténué, soyez certaine, madame, que le coupable sera découvert et puni.

— C’est toute mon espérance, dit-elle, à voix basse. Je ferai ce qu’il faudra pour cela. Et tous ceux qui m’entourent aussi, n’est-ce pas, Charlotte ? ajouta-t-elle en s’adressant à sa bonne.

— Madame peut compter sur moi », dit celle-ci gravement et en tendant le bras comme pour une promesse sacrée.