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Page:Maurice Maeterlinck - L'intelligence des fleurs, 1922.djvu/167

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L’INQUIÉTUDE DE NOTRE MORALE

quelle chose dans l’espace. Ce qui importe plus que l’idée, c’est le temps qui s’écoule autour d’elle : c’est le développement d’une civilisation, qui n’est que l’élévation de l’intelligence générale à un moment donné de l’histoire. Si demain, une religion nous était révélée, prouvant scientifiquement et avec une certitude absolue, que chaque acte de bonté, de sacrifice, d’héroïsme, de noblesse intérieure, nous apporte immédiatement après notre mort une récompense indubitable et inimaginable, je doute que le mélange de bien et de mal, de vertus et de vices au milieu de quoi nous vivons, subisse un changement que l’on puisse apprécier. Faut-il nous rappeler un exemple probant ? Au moyen âge, il y eut des moments où la foi était absolue et s’imposait avec une certitude qui répond exactement à nos certitudes scientifiques. Les récompenses promises au bien, comme les châtiments menaçant le mal, étaient, dans la pensée des hommes de ce temps,