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chasses et voyages au congo

car on tend à abandonner la méthode qui consistait à inciser en long l’écorce de l’arbre en place et à enlever chaque année trois bandes ou lanières alternes ; l’écorce ainsi enlevée repousse comme celle du chêne-liège.

La nuit qui vient arrête seule notre visite émerveillée dans cet Eden où la richesse extraordinaire des fruits alternant avec celle des fleurs prouve pour l’esprit pratique du P. Feys qui a su réunir ici l’utile et l’agréable, et à côté du savant et de l’artiste nous discernons tout son talent d’administrateur.

La journée si bien remplie se termina par un souper pris en commun avec les trois Pères de la Mission, auxquels on adjoignit en notre honneur, le Frère Basile dans lequel je retrouvais un compatriote, le nommé Hutting de Noerdange, ancien élève de Marienthal, qui est, comme tout le monde sait, la maison de recrutement où l’on forme les jeunes gens au rude métier de missionnaire, d’après les préceptes de Mgr Lavigerie, le grand apôtre de l’Afrique. Ensemble nous avons naturellement évoqué le souvenir de la mère-patrie et celui de la vallée d’Ansembourg où il passa sa jeunesse avant de partir pour ces lointaines contrées, d’où il ne reviendra sans doute plus jamais.

Notre conversation prit ensuite un tour plus général, et le P. Feys, répondant à nos questions, nous donna d’intéressants détails sur la région dont il est en quelque sorte le chef spirituel. Nous sommes ici dans le’pays Bushi, dont les gens parlent la langue Mashi, et le titre du chef est Nabushi ; de son nom de naissance le chef actuel s’appelle Rugema, mais depuis l’arrivée des blancs, on le domine Kabaré du nom de son ancêtre. C’est plutôt un Président de République, car choisi par le peuple et parmi le peuple, on a eu soin de prendre un « petit » pour pouvoir plus facilement le dominer et comme en Pologne le sceptre a été donné à l’un des plus jeunes fils du chef décédé. Dès que le nouvel élu est nommé, on apporte des boulettes qu’il doit manger en signe d’adhésion ; s’il refuse il s’en suit