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chasses et voyages au congo

à la chaux ; il y a d’abord deux énormes hangars pouvant servir de garages et capables d’abriter un certain nombre de camions de la dimension du nôtre, puis le logis principal, que nous avons occupé, dont l’assise est un mur en grosse pierre maçonnée et le couronnement un toit de chaume ; et tout autour court une espèce de vérandah dont les pilastres reposant sous le toit et le soutenant, ont l’air d’être en granit et rappellent les colonnes des temples grecs, mais en réalité ne sont sans doute que des troncs de palmiers. Mais cela n’y change rien, et l’illusion aidant, je me sens transporté loin, si loin dans le monde des rêves…

Hélas ! Il faut revenir sur cette terre, et un bruit discordant, lointain d’abord, puis plus proche me ramène en quelques secondes à la réalité et à la civilisation : avec un bruit de tonnerre, et une odeur nauséabonde, une motocyclette montée par deux métis, passe en trombe à côté de moi ; et file et pète dans la claire lumière du matin…

Depuis ce soir nous avons franchi la frontière de l’Uelé, mais avant de quitter l’Ituri il convient de rendre hommage à la beauté des femmes qui nous a particulièrement frappés dans cette région ; toujours nues elles nous ont paru moins avachies que dans d’autres parties du Congo et elles mettent même une certaine recherche d’élégance dans leur toilette sommaire, car au lieu de la ficelle brunâtre retenant le bouquet de feuilles qui sert à les vêtir, j’ai remarqué des colliers en perles de couleur bleu et rouge dont elles font des ceintures, et qui attirent le regard, mais malgré leur nudité, elles sont moins provocantes que les ménagères pour blancs qu’on rencontre dans les grands centres, et qui par leur air hautain et la façon dont elles roulent sur leurs hanches, en remontreraient aux demi-mondaines européennes. D’ailleurs les vrais sauvages dans la brousse valent mieux à mon avis, que les produits d’une demi-civilisation, qui sont trop souvent le fruit d’une éducation civile et religieuse que par un prosélytisme mal compris, on cherche à leur inculquer trop rapidement. Et peut-être réussirait-on