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chasses et voyages au congo


9 avril.

Lisala, où nous arrivons après avoir salué au passage Alberta, station des Huileries du Congo (Lever Bros), nous apparaît juchée à flanc de coteau et m’y étant informé d’objets en ivoire à acheter, dont on m’avait dit que l’endroit avait la spécialité, j’ai l’incroyable surprise de tomber sur un maçon entrepreneur de travaux publics pour l’État, qui est un ex-ouvrier de la Faïencerie Boch à la Louvière ; le monde est vraiment petit ! Notre nouvel ami nous mène au village indigène où les noirs travaillent l’ivoire, mais ils n’ont pour le moment rien de bien tentant à nous proposer : seul un vase assez grossièrement taillé, et pas tout à fait achevé, nous est offert après de nombreux palabres et beaucoup de réticences, car le noir qui est méfiant et craintif, a toujours peur du traquenard qu’il soupçonne le blanc de vouloir lui dresser, car dans le fond de son âme il n’est jamais tout à fait tranquille, l’ivoire qu’il s’est approprié pour son travail, étant neuf fois sur dix le fruit d’une chasse ou d’un achat clandestin, qui s’est opéré à l’insu de l’État, lequel seul a le monopole du commerce de l’ivoire.

Nous finissons pourtant par dénicher un petit crocodile sculpté dont nous faisons l’acquisition et qui plus que l’autre bibelot nous fait plaisir, car il faut que la matière se prête au but qu’elle doit remplir : ainsi l’ivoire employé pour faire des vases ne me plaît pas, tandis que le métal, le verre ou la porcelaine conviennent parfaitement à cet usage ; par contre l’ivoire employé pour représenter des animaux ou faire des figurines, des cors de chasse, des bracelets, des manches de cannes ou de parasols, toutes sortes d’ornements en un mot, donne de merveilleux résultats.


10 avril.

Nous avons passé la nuit en brousse, si l’on peut dire ainsi, c’est à-dire à un endroit du fleuve où il n’y avait ni poste, ni village, mais où les bancs de sable nous ont contraints à nous arrêter pendant les heures d’obscurité, et