conversations de la veille continuent à occuper votre esprit pendant les heures de sommeil, et bien souvent c’est une raison d’ordre purement physique qui est cause des cauchemars de la nuit.
Pourquoi alors croire à de mauvais présages ? Est-ce la rencontre de la veille sorcière à Penge ?
Au moment de dire adieu à la Colonie, pour toujours peut-être ? et de quitter le terrain de chasse où pendant des mois j’ai recueilli tant et de si fortes impressions, je me scrute et j’essaye de définir le sentiment qui me porte à entreprendre ces voyages, ou plutôt l’agrément que je trouve à chasser la grosse bête. Ce n’est certes pas uniquement le plaisir du tir, ni l’amour du danger et des risques que l’on court, ni des difficultés vaincues, car souvent celles-ci se hérissent de toutes sortes de choses désagréables.
C’est avec une certaine appréhension qu’on entreprend ces voyages, s’attendant toujours à un accident ou à un malheur d’un genre ou d’un autre. Et pourtant on refait des voyages pour risquer sa peau et sa santé, dépenser sa fortune. Pourquoi ?
Et toujours on y va, et toujours on y retourne. Pourquoi ?
Certes que le moment où un éléphant ou un buffle vous regardent de tout près est désagréable, et que ce soit le regard perçant des petits yeux clairs de l’éléphant, ou le regard méchant des yeux plissés du buffle qui vous observent, l’un et l’autre vous produisent un effet de froid dans le dos fort pénible, et pourtant quand on a tâté une fois du petit jeu, toujours on est tenté d’y revenir.
— Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ?
— Et si l’on me demande : y a-t-il un danger réel à chasser la grosse bête en Afrique, je répondrai : Les dangers qu’on court dans la solitude sont exagérés sur la foi de certaines relations ; il ne faut pas croire à la lettre, des histoires répétées partout, et voir des aventures dans des incidents ordinaires. Sans doute il serait aussi déraison-