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ANTHINEA

La salle Elgin est une galerie fort longue, point trop mal éclairée et du reste pourvue de globes électriques puissants ; mais le visiteur n’y peut pas reculera sa fantaisie, selon les exigences des belles choses qu’il contemple. Ce peuple opulent n’a point fait à ses brigandages un palais qui fût digne d’eux. Non seulement ils dépérissent par la faute de l’air ou perdent leur valeur par la qualité malheureuse de la lumière, mais l’espace même leur manque. Le mal, il est vrai, est petit. Pour qui passe en ce lieu, tous les mots perdent de leur force, et il arrive ce que Goethe considérait comme l’effet propre de la beauté :

« Qui la contemple ne peut être effleuré d’aucun mal et se sent en harmonie avec lui-même et avec l’Univers. »

Personne n’ignore que lord Elgin, ambassadeur de l’Angleterre auprès de la Sublime Porte, obtint en 1801 un firman qui l’autorisait à faire d’Athènes sa proie. Pendant deux ans entiers, la pillerie fut déchaînée. Le Parthénon, déjà meurtri par une bombe vénitienne lancée en 1687 par un capitaine allemand de l’escadre de Morosini, livra à la rapine le principal de sa décoration. Les marbres des frontons, la frise intacte, les métopes furent descellés ou même arrachés, puis embarqués pour Londres.

Lord Elgin osa davantage. Des six cariatides