de fortunes fâcheuses. Mais le hasard est innocent des maux immenses qui résultaient de la série de nos troubles civiques. Ces maux sont dus à l’imprévoyance des hommes et surtout à l’anarchie des institutions. Si, pendant qu’on édifiait Fort-Desaix, Mathieu Dreyfus a pu recruter un parti au traître, son frère[1], et allumer ainsi une guerre civile, — si l’œuvre d’un simple particulier a pu causer de tels effets, — si, au moment même où les nôtres se mettaient en marche pour Fachoda, Paris et la France ont pu se battre jour et nuit pour M. Zola : ces accidents scandaleux n’ont été possibles qu’à la faveur de la caducité absurde de l’État. Non, n’alléguons pas de surprise. La sagesse politique consiste à savoir qu’il y a des imprévus dans la marche du monde : elle échelonne les moyens d’y faire face et d’y pourvoir.
La folie, la faiblesse des années 1897, 1898, 1899, étaient comme enfermées et sous-entendues dans un régime où nul barrage n’était opposé aux sautes de l’opinion ni préposé à la défense de l’intérêt général contre le caprice des foules ou l’entreprise des factions que subventionnait un ennemi bien organisé et bien soutenu. « Nous n’avions point d’État ! » On avait négligé d’en forger un quand il était temps. On avait refusé
- ↑ C’est à ce moment-là que Mathieu Dreyfus écrivît la lettre publique dans laquelle il dénonçait, comme le véritable traître, un homme de paille à la solde des juifs, Esterhazy.